(BEL. Lierneux, Plume d’aventure. 2006) : avec sa jument Karamelle et son chien Douro, depuis la Belgique vers le Portugal, 7000 km aller et retour.

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  • 4 décembre 2009
    Bernard Delhomme

    Josiane force l’admiration. Au début de cette histoire, elle est mariée avec un gendarme, elle élève deux filles qui approchent de l’adolescence, elle vit à la campagne avec un chien et deux chevaux, le ménage ne roule pas sur l’or, bref, elle est dans la pire des configurations pour vivre l’aventure, apanage comme chacun sait des jeunes, des célibataires et autres électrons libres de notre société. Et tranquillement, pas à pas, elle réussit ce tour de force de tout organiser, sa vie et celle de sa famille, pour accomplir un vieux rêve d’adolescente qui traînait dans un recoin de son imagination : une boucle en solitaire de sept mille kilomètres à travers la France, l’Espagne et le Portugal, avec sa jument Karamelle et son chien Douro.

    Karamelle s’appelait à l’origine « Graine de Folie ». « C’était une petite furie » paraît-il. Il fallait quelqu’un de la trempe de Josiane pour réussir à lui mettre un peu de plomb dans la cervelle. Mission accomplie : j’ai pu vérifier moi-même l’excellence de cette jument sur un parcours de plusieurs centaines de kilomètres. Cette relation de l’auteur avec sa monture ne fut pas simple. Sa description sans concession donne une saveur particulière à ce récit. Peu de cavaliers sont capables d’une telle franchise. Mais Josiane est une « femme de vérité » qui n’écrit pas pour son image. Et c’est là une deuxième vertu de ce livre. Le lecteur se retrouve devant un personnage avec ses forces et ses faiblesses, dans la réalité pure et dure du voyage avec un cheval, qui, comme chacun sait, est un exceptionnel condensé de vie et de situations inédites. Grandeurs et bassesses, beautés et misères, générosité et mesquineries se côtoient, parfois au quotidien, mais toujours sur ce fond de vaillance qui va parfois jusqu’au courage, ce renoncement qui flirte souvent avec l’abnégation et cette détermination sans faille qui emmènera le couple au terme de son cycle par delà tous les obstacles.

    « Graine de folie » n’a-t-elle pas transmis à sa cavalière le gène fatidique ? On découvre au fil des pages que Josiane est à la fois cette « bonne fille » sensible à l’opinion des autres et la rebelle qui se moque du qu’en dira-t-on, que dans un contexte très conventionnel, elle est capable de réaliser des projets complètement excentriques, qu’elle déclare détester sa jument mais qu’elle fait tout pour elle, qu’elle fait un voyage pour « convenances personnelles » mais qu’elle y associe non seulement sa famille mais des enfants malades à travers son association « Voyage pour des enfants ». En fait, Josiane déroute, parce qu’elle est comme tout le monde... sauf une exception, mais de taille : entre les rêves et la réalité il n’y a qu’un fil, et pour elle ce fil n’existe pas. Je crois que sa folie est là, dans cette sagesse oubliée : « Tout est possible, à condition de se donner les moyens de ses désirs ».

    La preuve : ce voyage, ce livre, ce qui a suivi, ce qui va suivre. Car Josiane ne va pas s’arrêter là. Elle a du sang d’Ardennais dans les veines. Il paraît que c’est un des rares endroits où l’on rencontre encore des descendants d’Astérix et d’Obélix.

    Et puis, n’est-ce pas cette graine de folie qui font les chevaux hors du commun et les êtres d’exception ?

    Stéphane Bigo