Tableau des mœurs françaises au temps de la chevalerie, tiré du roman de Raoul et Ermeline par le Comte Pierre Louis de Rigaud Vaudreuil
HISTOIRE DES DEUX PÈLERINS.
Tableau des mœurs françaises au temps de la chevalerie, tiré du roman de Raoul et Ermeline par le Comte Pierre Louis de Rigaud Vaudreuil
HISTOIRE DES DEUX PÈLERINS.
Récit de deux Pèlerins : Tableau des mœurs françaises au temps de la chevalerie, tiré du roman de Raoul et Ermeline par le Comte Pierre Louis de Rigaud Vaudreuil
Quelle heureuse « trouvaille » que ce récit méconnu ainsi mis à la disposition des esprits curieux ! Et le commentaire publié dans le Bourdon souligne à quel point ces lignes fourmillent d’enseignements aussi bien sur les pèlerins du Moyen-âge que sur l’image que l’époque romantique s’en forgeait. Ce témoignage avec ses deux niveaux d’interprétation qui relèvent de deux époques distinctes nous éclaire-t-il sur les « bénéfices » qu’apporte le pèlerinage de Compostelle au XXI ème siècle ? A chacun d’en décider à la lumière de sa propre expérience.
Ce passionnant roman d’aventures nous fait vivre les péripéties d’un valeureux jeune homme pauvre assoiffé de gloire et de fortune. Centule « s’en va-t-en guerre » contre les Maures pour devenir chevalier, s’enrichir, et gagner le cœur de sa belle. L’intrigue sans surprise d’un nouveau « roman de chevalerie » va s’orienter de façon plus originale dès le premier chapître : miraculeusement rescapé d’une terrible tempête, notre héros et son compagnon d’armes font le vœu de se rendre sur la tombe de l’apôtre à Santiago de Compostela. Ce pèlerinage imprévu répond à trois objectifs : obtenir le pardon de leurs offenses, remercier Saint Jacques de son intervention qui les a miraculeusement sauvés de la mort, se préparer à lutter contre les infidèles en « croisés » qui vont recouvrir leur armure de leur cotte de pèlerins. Voilà un premier pas franchi sur le chemin du paradis, et le patronage de Saint Jacques Matamore va armer le bras de ces valeureux pèlerins et veiller à leur salut au cœur des batailles. Le nouvel état d’esprit du jeune homme qui a frôlé la mort et s’avère maintenant plus soucieux du salut de son âme attirera les bénédictions du Ciel : c’est un chevalier qui reviendra de la guerre sain et sauf, couvert de gloire, et fortune faite … !
Chanson de Geste, ce « roman picaresque » où à chaque étape notre héros va faire la connaissance de nouveaux personnages au hasard des rencontres, vivre des évènements extraordinaires ou trouver l’occasion de manifester sa bravoure ? L’action va transporter le lecteur en Espagne sous le règne de Jacques Ier d’Aragon, « le Conquérant, » mais l’auteur ne cède jamais à la tentation de l’exotisme de pacotille. Par contre, il excelle à faire partager l’attrait des romantiques pour l’effroi qu’on se plait à éprouver devant les éléments déchaînés, ou les phénomènes surnaturels.
Ce récit ne prétend pas être un « conte initiatique, » mais il relève d’un genre encore peu répandu en France à l’époque, le « roman de l’apprentissage » : lancé à la découverte du monde, condamné à affronter de terribles épreuves et à relever des défis surhumains, le jeune héros va avoir l’occasion de révéler ses qualités et de se forger une personnalité épanouie, équilibrée. L’amour et la richesse viendront couronner cet apprentissage de la vie. L’itinéraire de Centule, « rite de passage, » est lourd de signification : le « Château du Diable » résonne comme un avertissement, une mise en garde, son chemin de Compostelle le fait se dépouiller des illusions de ses années de jeunesse, l’Occident (occidere : occire) supprime, fait disparaître symboliquement l’homme insouciant qu’il a été jusque là, le Levant va incarner sa « renaissance, » le soleil y fera lever une ère nouvelle riche de promesses.
Mais chacun de nos modestes pèlerinages d’aujourd’hui n’est-il pas lui aussi un cheminement, une forme de « reconquête » ?