La place de la prière

Un pèlerinage comme celui que j’ai fait est une grande aventure. On a toujours plus ou moins le sentiment d’avoir réalisé un exploit, riche de rencontres et d’épisodes savoureux à partir desquels il serait facile de faire un reportage qui passionnerait quelques amis.
Mais attention ! Cela peut être un piège.
On s’attarde un peu sur le côté pittoresque d’une épopée... Vous vous rendez compte ? 1600 km à pied ! Cela impressionne toujours et on a vite fait de cultiver, chez les autres, cette soif de détails colorés que pourrait apporter un récit chronologique où apparaîtraient surtout des événements décrits de façon très extérieure.
Qu’ai-je vécu intérieurement ? Quel espace ai-je donné à la prière ? Comment ai-je été nourri par cette expérience ? Comment ai-je été visité par le Seigneur ? Telles sont les questions qui méritent beaucoup plus d’être partagées en toute simplicité.
J’ai, précédemment, donné des éléments de réponse à quelques unes de ces questions, mais je voudrais, cette fois, tenter d’aller un peu plus loin. (ultreïa !)
Comme je l’ai déjà mentionné, ce qui m’a beaucoup touché a été l’élan de mes amis, de mon entourage, de ma communauté, pour " m’accompagner " dans cette démarche. Cela a été, pour moi, beaucoup plus qu’un simple réconfort et en cela, j’ai été un pèlerin tout à fait privilégié. Il s’est établi, à ce moment là et durant tout mon pèlerinage, comme une sorte de communion très forte entre nous.
Christian, qui m’avait beaucoup aidé à préparer ce pèlerinage et qui l’avait déjà fait lui-même en entier, m’avait dit : Il y aura des moments difficiles, des périodes de découragement ; et je sais que le départ, à chaque nouvelle étape, risquera parfois d’être un moment critique. Alors je m’engage à prendre un temps pour penser à toi chaque matin, tous les jours que durera ton pèlerinage.
Un autre ami, prêtre, m’avait dit : Chaque jour, dans l’Eucharistie, j’offrirai ton pèlerinage et je prierai à tes intentions.
A l’Arche, également, je savais que le Père Gilbert et mes amis priaient beaucoup pour moi. De fait, j’ai été gagné plusieurs fois par le découragement, j’ai été tenté d’abandonner ou de rejoindre Santiago par le train, mais c’est le fait de me sentir porté dans la prière de tant de personnes qui m’a aidé à continuer.
Je me sentais donc redevable de tout cela. Parfois je me demandais si cela n’était pas trop ! J’avais donc décidé de réserver, quotidiennement, un temps pour la prière du rosaire, avec la méditation des différents mystères, un chapelet le matin et un autre l’après-midi.
Cette prière était offerte à toutes les intentions que je portais et qui m’avaient été confiées avant le départ ou même au cours du pèlerinage. Certaines que j’avais annoncées publiquement, comme la demande d’Assistants pour la Communauté, d’autres plus personnelles qui m’avaient été confiées individuellement.
En effet j’avais tenu à rester en lien avec mon épouse, et par elle avec la Communauté, par le biais d’une carte de téléphone que je renouvelais périodiquement. C’est ainsi que je pus, même en cours de route, recevoir de nouvelles intentions. Je pensais pouvoir les honorer à la fois par ma prière et par l’offrande de mes petites épreuves, physiques ou morales. Je me demande aujourd’hui si un plus grand abandon à la Providence, auquel je ne me sentais pas préparé, n’en aurait pas augmenté d’autant l’efficacité.

En ce qui concerne les épreuves, le Seigneur ne m’a pas oublié, à la mesure, bien sûr, de mes capacités.
Je ne m’étendrai pas sur les petites souffrances physiques déjà mentionnées et qu’il était bien facile d’offrir à Dieu. C’est d’une autre manière que le Seigneur m’a visité et qu’il me demande aujourd’hui de continuer d’espérer :
En effet, il y a eu cette alerte, mystérieuse, vers la moitié de mon pèlerinage. Anne, mon épouse, dut être admise d’urgence à l’hôpital pour un problème intestinal, aujourd’hui encore inexpliqué. Elle s’est trouvée brusquement très mal en point et les médecins, après plusieurs analyses, n’ont pas bien compris ce qui s’était passé. J’étais, à ce moment-là, encore sous le coup de ma tendinite et prêt à tout abandonner.
Y avait-il, dans cet incident, qui aurait pu très mal tourner, une relation avec ce que je vivais de mon côté ? Je suis tenté de le penser bien que pour moi cela reste encore assez mystérieux. Anne n’a pas voulu, ou pas pu m’accompagner. Peut-être le Seigneur lui a-t-il proposé de le faire d’une autre manière ...? Toutefois si son expérience a été plus courte que la mienne, (environ 8 jours) elle en a largement eu sa dose en intensité.
Mon pèlerinage est-il terminé ?

Bien que je ne sois plus, physiquement, sur le Chemin de St Jacques, cette expérience m’a tout de même profondément marqué. Pour moi, le pèlerinage continue d’une autre manière. Si l’Esprit Saint m’a appelé à marcher vers Compostelle, c’est bien que Dieu devait avoir son plan et qu’il faut continuer de tout Lui abandonner.

" Ce qui attire le plus de grâces du Bon Dieu, c’est la reconnaissance, car si nous le remercions d’un bienfait, il est touché et s’empresse de nous en faire dix autres... "

Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus

Prière de Bénédiction

Dieu tout puissant, Tu ne cesses de montrer Ta bonté à ceux qui t’aiment et de te laisser trouver par ceux qui Te cherchent.
Sois favorable à ton pèlerin qui part sur le chemin de Compostelle et dirige ses pas selon Ta volonté.

Sois pour lui un ombrage dans la chaleur du jour, une lumière dans l’obscurité de la nuit, un soulagement dans la fatigue afin qu’il parvienne heureusement sous Ta garde devant le tombeau de l’apôtre Jacques.

Par Jésus, le Christ, notre Seigneur.

Amen